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FACTORISATION

 

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Factorisation – Méthodes

Différence de carrés

Avec des complexes

Méthode de Fermat

Machine de Carissan

 

Sommaire de cette page

>>> Approche

>>> La machine des frères Carissan

>>> Méthode du crible – Algorithme de base

>>> Exemple de factorisation

>>> La théorie avec nouvel exemple de factorisation

>>> La machine de 1919

>>> Historique

 

 

 

 

 

 

 

Machine à factoriser des frères Carissan

Méthode du crible

des résidus quadratiques

 

Au basculement du XXe siècle, sans l'aide des ordinateurs, la factorisation des nombres restaient un problème sujet à de longs calculs. Quelques inventeurs cherchèrent à accélérer mécaniquement ces calculs. La machine des frères Carissan et la première à avoir réalisé ce tour de force.

Le calcul est basé sur la méthode de Fermat, transformant la recherche de facteurs à celle de deux carrés. La recherche est "écrémée" en éliminant toutes les solutions dont les restes des divisions sont incompatibles avec ce que donne un carré. Méthode dite du crible par résidus quadratiques (reste de la division du carré du nombre).

 

Vous serez étonnés en lisant cette page de constater que le principe de la machine n'est pas si compliqué à comprendre si on connait deux choses: la division et ses restes, et une identité remarquable très classique: x² – y²  = (x – y) (x + y).

 

Anglais: Automatic sieve mechanism / Carissan machine

 

 

 

Approche

 

Il s'agit de la recherche des facteurs d'un nombre N par la méthode de Fermat. Elle consiste à poser que le nombre (impair, car si pair il est divisible par 2) est toujours différence de deux carrés, donc produit de deux facteurs (Identités remarquables).

 

 

 

La MACHINE des frères CARISSAN

 

Lorsque les facteurs sont voisins, il est possible d'utiliser des moyens mécaniques pour effectuer le balayage des possibilités pour x (25, 26, 27 …): c'est le cas, en particulier, de la machine des frères Carissan, fabriquée en 1912.

 

Le tableau montre les recherches pour 605 à 625.

Par exemple pour le nombre 609, le tableau montre une correspondance avec 25 et 4 qui conduit à la relation:

609 = 25² – 4² = (25 – 4) (25 + 4) = 21 x 29

On trouverait aussi, non visible cette partie du tableau:

609 = 47² – 40² = 7 x 87

 

On retrouve également notre exemple avec 611. On constate bien une correspondance avec 30 et 17 qui conduit à: 611 = 30² – 17².

 

 

L'originalité de la machine consiste à implémenter ce genre de tableau, à mémoriser ces informations en quelque sorte.  Un disque tournant muni de picots va faire l'affaire.

 

Mais pas que! Un second principe est mis en œuvre pour accélérer la recherche. En fait, une propriété qui va servir à éliminer rapidement des nombres qui de toute façon ne sont pas des carrés. Plusieurs disques "gigognes" tournant ensemble vont faire l'affaire.

 

 

 

Méthode du crible – Algorithme de base

 

La factorisation du nombre N procède en quatre étapes

 

1.   On transforme le nombre N en différence de deux carrés x² – y² ;

2.   On identifie les nombres possibles à travers plusieurs cribles.

 

Cribles: on choisit plusieurs tailles m du crible. Alors x² est divisé par m. On ne retient que les restes possibles de cette division (résidus quadratiques). Si seuls 0 et 3 sont possibles, on note .

 

3.   On choisit une valeur initiale de x qui est passé aux cribles. À défaut de répondre au critère du crible, on passe à la valeur suivante de x. La solution est trouvée lorsque x rempli toutes les conditions des cribles.

4.   Connaissant x, on calcule y, et finalement les deux facteurs.

 

 

Illustration

 

Remarque importante

Les cribles permettent d'éliminer sûrement des valeurs pour x; mais celles qui restent dans le "tamis" ne sont que potentiellement solutions. Plus il a de cribles (de valeurs du modulo m) et plus la solution est cernée. De toute façon, le calcul final des facteurs de N permet de juger de la pertinence de la valeur trouvée.

 

 

 

Exemple de factorisation

 =

611

= x² – y²

= (x – y ) (x + y)

= 611 + y²

Recherche de la valeur de x.

mod 8

(crible 1 avec m = 8)

 3 + {0, 1, 4}

Restes de la division par 8. Les carrés dans ce cas se terminent toujours par 0, 1 ou 4

 

 

 {3, 4, 7}

Les restes s'ajoutent.

Seul 4 est compatible avec le fait que x est un carré, donc en 0 , 1 ou 4.

 

x

 {2, 6}

Car 2² = 4, et

6² = 36 divisé par 8, reste 4.

 

 {1}

C'est le 4 de x moins le 3 de 611.

 

y

 {1, 3, 5, 7}

Pour information

mod 3

(crible 2 avec m = 3)

 2 + {0, 1}

 {2, 0}

En ajoutant 2 + 1 = 3, on trouve un nombre qui modulo 3 (reste de la division par 3) est 0.

 

x

 {0}

Seule possibilité de reste pour la division par 3.

Bilan

x

 {0} et {2, 6}

En mod 3 puis mod 8.

x = ?

> 611

Car égal à 611 + y²

 

x

> 24,7

On prend 25 comme valeur de départ de nos recherches.

 

25

 {1 / 1}

Successivement restes pour divisions par 3 puis par 8.

 

26

27

28

29

 {2 / 2}

 {0 / 3}

 {1 / 4}

 {2 / 5}

Au mieux qu'une seule valeur telle qu'attendue.

 

30

 {0 / 6}

Deux valeurs compatibles.

X = 30 est un bon candidat pour la solution. Il faut encore le vérifier, car nous avons utilisé que deux tamis celui du reste par 3 et celui du reste par 8.

Vérification

= x² – 611

= 30² – 611

=289 = 17²

Reprise de légalité initiale.

Factorisation

611

= 30² – 17²

= 13 x 47

 

 

La théorie avec nouvel exemple de factorisation

Elle repose sur l'utilisation des résidus quadratique autrement-dit des restes de la division des carrés par un nombre donné.

 

Si  x = 10

Son carré est    100

Divisé par 7:    100 = 7 x 14 + 2

Résidu quadratique de 10 mod 7 = 2.

Voir Table

En examinant les carrés des nombres modulo m, il se dégage des possibilités et des exclusions.

Avec le modulo 7, les résidus quadratiques sont 0, 1, 2, 4.

Conséquence:

Un nombre n dont le résidu quadratique modulo 7 est 3, 5 ou 6 n'est pas un carré.

Dans l'autre cas, il se peut que le nombre soit un carré.

Balayage sur plusieurs valeurs de m.

Avec un examen sur diverses valeurs de m, on élimine tous les nombres certainement non carrés. C'est le principe du crible.

Soit:

N = 250 507

Il faut trouver un carré avec:

x² = 250 507 + 

Prenons modulo 7.

N  5 mod 7     (250 507 = 7 x 35 786 + 5)

Conséquence:

 

   5 + y²       mod 7

 

Or, seules possibilités pour un carré:

         {0, 1, 2, 4}    mod 7

         {0, 1, 2, 4}    mod 7

Rapprochons dans le monde du modulo.

En rouge, les deux seules valeurs compatibles.

                  5 + y²                 mod 7

{0, 1, 2, 4}   5 + {0, 1, 2, 4}  mod 7

{0, 1, 2, 4}           {5, 6, 0, 2}  mod 7   

Donc:

         {0, 2} mod 7

En revenant à x.

x          {0, 3, 4} mod 7

On vérifie, par exemple, que 3x3 = 9 qui donne bien un reste de 2 lorsque divisé par 7

0, 3 et 4 sont les seules valeurs possibles.

 

Prenons modulo 9

N  1 mod 9

Même raisonnement.

   1+ {0, 1, 4, 7}  mod 9

{0, 1, 4, 7}         {1, 2, 5, 8}  mod 9

Valeurs possibles pour x²

et pour x.

1

1, 8

Prenons modulo 15

N  7 mod 15

Table des restes

de la division du carré

par 15.

Même raisonnement.

   7 + {0, 1, 4, 6, 9, 10}  mod 15

{0, 1, 4, 6, 9, 10}   {7, 8, 11, 13, 1, 2}  mod 15

Valeurs possibles pour x²

et pour x.

1

1, 4, 11, 14

Il s'agit maintenant de trouver des nombres donnant ces modulos possibles simultanément.

Exemple: si x = 1000, alors

1000  6 mod 7 or il nous faut 0, 3 ou 4;

1000  1 mod 9 or il nous faut 1 ou 8;

1000  10 mod 15 or il nous faut 1, 4, 11, 14.

Donc 100 ne passe pas le test du crible, il est rejeté.

Départ de l'exploration avec racine de N car x² est supérieur à N.

x départ = 501

Nous explorons (la machine va explorer) les valeurs successives.

 

Pour 514, 3 est bien dans la liste des possibles mod 7, comme 1 pour mod 9 et 4 dans mod15.

 

501  {4, 6, 6} mod {7, 9, 15}

502  {5, 7, 7}

503  {6, 8, 8}

504  {0, 0, 9}

514  {3, 1, 4}  BINGO

 

Vérification. Elle est nécessaire car nous n'avons utilisé que trois tests (trois modules "m").

La machine de Carissan en utilise 14.

x² – 250 507 = y²

y² = 514² – 250 507 = 13 689 = 117²

 

250 507 = (514 – 117)(514 + 117)

                 = 397 x 631

 

 

La machine de 1919

 

La machine comporte 14 disques concentriques représentant les valeurs m des cribles pour 19, 21, 23, 26, 29, 31, 34, 37, 41, 43, 47, 53, 55, 59. Sur chacun se trouvent des picots équidistants sur la face supérieure dont la quantité reflète les exclusions du crible.

Un engrenage dont l'axe est parallèle au plan des disques les engrènent tous à la même vitesse. C'est en tournant la manivelle associée que l'on fait défiler les valeurs de x.

Les picots sont des solutions potentielles. En rotation, ils passent sous une ligne d'analyse. Si une solution apparaît du fait de l'alignement des picots sous cette ligne, un contact est établi et un signal sonore alerte l'opérateur.

La machine met, par exemple, 15 minutes pour prouver que M31  est premier. Une motorisation avait été envisagée pour accélérer la recherche.

 

 

 

Historique

 

1876 – Lucas écrit qu'il a inventé une machine qui serait capable de trouver les nombres premiers qui auraient des centaines de chiffres.

1883 – Le russe I.M. Pervushin prouve que 261 – 1 est premier, contrairement à ce qu'en pensait Mersenne. P. Seelhoff le démontre également en 1886 et idem pour J. Hudelot en 1887. Il leur fallait plus de 50 heures pour y parvenir.

1896 – Lawrence découvre un moyen d'automatiser la factorisation en utilisant des engrenages et basée sur le principe d'exclusion des résidus. La machine ne fut jamais réalisée et la description est restée incomplète.

1903 – F.N. Cole factorise 267 – 1 et indique que cela lui a pris trois ans de dimanches. Il en fait l'annonce à une réunion de l'American Mathematical Society en allant au tableau et en écrivant sans commentaire: 267 – 1 = 193 707 721 x 761 838 257 287

1910 – André Gérardin publie une traduction en français des idées de Lawrence. Ce document relance la passion pour réaliser cette fameuse machine à factoriser.

1891 – Lucas et H. Grenaille entreprennent la construction de la machine ("piano arithmétique") capable de vérifier si 2n – 1 (Nombre de Mersenne) en quelques heures. Mais … Lucas décède sans écrit et sans la machine!

1912 – Maurice Kraitchik et A. Gérardin imagine une telle machine. Sans qu'ils le disent cette machine ressemble de près à celle décrite par Lawrence.

1912 – Réalisation d'un prototype de machine à factoriser par Pierre Carissan.

1914 – T.E. Mason fait les plans d'une machine qui appliquerait le test de primalité de Lucas aux nombres de Mersenne.

1919 – Réalisation (un seul exemplaire) de la machine à congruences par Eugène Carissan. C'est Eugène qui la termine et la présente à l'exposition des machines à calculer de Paris en 1920.

C'est, à preuve du contraire, la première machine à factoriser construite et qui marche. Carissan prétend que sa machine calcule la factorisation des nombres à dix chiffres en moins de 15 minutes. D'abord à l'observatoire de Floirac (proche de Bordeaux), elle est aujourd'hui au musée du CNAM (Arts et Métiers) à Paris.

Les frères Carissan: Pierre (1871-1923) et Eugène (1880-1925).

 

1925 – A.J.C. Cunningham et H.J. Woodall publient des tables de factorisation des nombres de la forme  pour b un nombre petit non carré et pour n même très grand. Ces tables sont complétées en permanence et une nouvelle version fut publiée en 1983 puis en 1988.

Après1925 – Arrêt des recherches intenses sur la machine à factoriser, car les calculateur de bureau sont disponibles. On cherchera alors des méthodes qui utilisent ces machines standards.

1932Lehmer propose une machine qui calcule à raison de  5000 nombres par seconde.

 

 

 

 

 

 

 

 

Voir

*    Différence de carrés

*    FactorisationIndex

*    Pascaline

*    Congruence

*    Histoire des ordinateurs

*    Machine de Babbage

DicoNombre

*    Nombre 611 et suite

Sites

*    Machine de Carissan (pdf)

*    Machine de Carissan – Texte de Carissan par l'Université Diderot Paris VII (pdf)

*    Histoire du calcul – Machine à congruences de Carissan

*    Discovery of a Lost Factoring Machine

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